Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication (Crem, Université de Lorraine).

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Cake day: June 14th, 2023

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  • Pascal Robert et moi étions revenus sur la fameuse “lettre pour une pause” signée par des milliers d’experts autoproclamés de l’IA :

    https://theconversation.com/presenter-lia-comme-une-evidence-cest-empecher-de-reflechir-le-numerique-211766

    Le fait de jouer à se faire peur est un marqueur ancien des discours autour de l’informatique (l’article en présente 6 autres). Consciemment ou non, ceux qui agitent ces peurs fantasmées cherchent à nous persuader de la puissance de la technique. Comme ils se présentent en experts, c’est une manière pour eux d’asseoir leur pouvoir. Derrière ce discours trompeur, le “progrès” peut se poursuivre sans s’embarrasser de débat public sur les choix techniques et sur leur mise en œuvre.

    Je parle sciemment de “technique” et pas de “technologie”. Car la technologie recouvre l’étude des outils et des techniques, et donc l’ensemble des connaissances à leur sujet. Or les chantres de “l’innovation technologique” se bornent à la connaissance technique pure (c’est ce qu’ils appellent “progrès”), en omettant les contextes sociaux, politiques, écologiques et économiques avec lesquels elle interagit.

    L’IA, ce ne sont pas que des machines et des logiciels. C’est aussi toute une infrastructure de datacenters, de câblages, de production d’énergie… Et derrière, ce sont des mâles blancs privilégiés qui développent les techniques, avec d’autres cols blancs qui les font tourner. Mais surtout une armada de travailleurs du clics qui annotent les données pour quelques $ la journée. Et bien sûr toutes celles et ceux qui produisent ces données et qui n’ont pas voix au chapitre quant à l’utilisation qui en est faite.

    Ce qui pourrait être un grand projet d’intelligence collective (mettre en commun l’intelligence de chacune et chacun pour réaliser des tâches impossibles à l’échelle individuelle) est une vulgaire entreprise d’enrichissement privé avec des conséquences bien réelles sur l’équilibre de nos sociétés.